jeudi 26 décembre 2024

Louise Michel une écrivaine prolifique (3/3)

Louise Michel était une femme surprenante.

Elle était connue pour son esprit altruiste et sa générosité ; elle n’hésitait pas à distribuer aux plus pauvres qu’elle, ce qu’elle possédait. Elle a montré une grande détermination et un courage remarquable, notamment par ses actions durant la Commune de Paris et surtout, en acceptant les conséquences de ses actes.

Elle était une femme indépendante, ayant refusant de prêter serment à l’Empire et préférant ouvrir une école libre ; fidèle à ses idéaux, elle est restée célibataire, malgré un caractère enjoué qui la rendait très attachante.

Elle a élevé et recueilli toutes sortes d’animaux ; elle aimait dessiner la nature et écrire….

Louise Michel passait beaucoup de temps à écrire, des poèmes, des chansons, des romans, des contes, des essais, souvent tard dans la nuit, après des journées bien remplies. Son œuvre littéraire reflète bien sûr ses convictions politiques et sociales, ainsi que son engagement en faveur des causes révolutionnaires et anarchistes.

Vous pouvez retrouver ses œuvres sur WikiSource, mais j’ai une préférence pour les œuvres originelles de Gallica :

  • Mémoires (1886), récit autobiographique où elle raconte sa vie et ses luttes

  • La Commune (1898), ouvrage détaillant les événements de la Commune de Paris

  • Les Méprisées (1881-1882) roman rédigé en collaboration avec Jean Guêtré, pseudonyme de Jean Placide Turigny, médecin et homme politique français (1822 – 1905) ; Turigny était un opposant à l’Empire, puis un radical et enfin un socialiste ;  il était connu pour son engagement social et politique, notamment dans la presse démocratique et les milieux d’opposition ; ce roman de mœurs parisiennes explore les conditions de vie des femmes et les injustices sociales auxquelles elles sont confrontées ; il est riche en descriptions de la vie parisienne et des luttes des classes populaires

  • La Misère (1882), roman écrit peu après son retour du bagne de Nouvelle-Calédonie ; l’histoire se déroule dans un contexte social difficile et explore les thèmes de la pauvreté et de l’injustice sociale. Louise Michel utilise son imagination fertile pour créer une œuvre réaliste qui dépeint les souffrances des classes populaires

  • Le Bâtard impérial (1883), roman écrit conjointement avec Jean Winter ; il explore les thèmes de la légitimité et de l’injustice sociale à travers l’histoire d’un personnage central qui lutte pour sa place dans la société

  • Contes et légendes (1884), recueil de contes qui explore les thèmes de la société et de l’humanité à travers des histoires morales et poétiques, destiné à instruire les enfants tout en les divertissant

  • Les paysans, écrit en collaboration avec Émile Gautier, journaliste et militant anarchiste ; ce livre explore les conditions de vie des paysans et les injustices sociales auxquelles ils sont confrontés

  • Lueurs dans l’ombre (1861) explore des thèmes tels que la folie, la criminalité, et l’enfermement asilaire ou carcéral ; Louise Michel y aborde déjà des questions profondes sur la condition humaine et les injustices sociales, fidèle à son engagement pour les droits des opprimés et son esprit révolutionnaire

  • Défense (1883), discours prononcé par Louise Michel le 22 juin devant la cour d’assises de la Seine ; elle y défend ses actions et ses convictions anarchistes

  • Lectures encyclopédiques par cycles attractifs (1888), compilation de textes éducatifs destinés à instruire les lecteurs sur divers sujets de manière attrayante et accessible ; fidèle à son engagement pour l’éducation populaire, Louise Michel utilise ce recueil pour partager ses connaissances et ses réflexions sur des thèmes variés

  • Et enfin les célèbres Lettres à Victor Hugo : 1850-1879 : une collection de lettres échangées avec le célèbre écrivain Victor Hugo ; à travers cette correspondance, on découvre une jeune Louise Michel, provinciale et pieuse, qui évolue vers une figure révolutionnaire et anarchiste.

Bien évidemment, vous pourrez retrouver ces écrits dans vos bibliothèques municipales (Vald’Yerres Val de Seine) ou bien sur Amazon.

Pour en savoir plus :

Louise Michel — Wikipédia

Louise MICHEL, icône de la Révolution (2/3)

On a dit tant de choses – des vraies et des moins vraies – sur Louise Michel que j’ai voulu me faire une idée du personnage. Alors j’ai lu ses « Mémoires ».

Louise Michel (1830-1905) est une figure révolutionnaire et anarchiste de premier plan, connue pour son engagement en faveur de l’éducation, sa lutte pour la justice sociale et son influence dans le mouvement anarchiste.

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Plongez dans ce portrait de Louise Michel, où vous est racontée son histoire qui traverse le 19e siècle français. Militante, révolutionnaire, bagnarde, anarchiste et écrivaine : Louise Michel est une femme tempête dans un siècle utopiste.

À quoi ressemble l'enfance de l'écrivaine révolutionnaire Louise Michel ? Si elle est née dans un château, cela ne l'empêchera pas de se rêver hors des carcans de son époque et d'entamer une révolution politique.

Au cœur du huis clos du procès de Louise Michel, retraçant 72 jours de soulèvements et de révoltes lors de la Commune de Paris.

Entre le procès et le bagne, jusqu'en Nouvelle-Calédonie, s'étend un long parcours pour Louise Michel, qui ne laisse pas ses convictions et son talent d'écrivaine derrière elle.

Après le bagne, le retour. Cheminement qui signe l'avènement de Louise Michel en figure symbolique de la Révolution, et bientôt de l'anarchie.

À la fin de la vie de Louise Michel, le refus des dominations, aussi multiples qu'elles soient, ne s'amenuise pas, au contraire…

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On peut certainement dire que Louise Michel est une icône de la Révolution. Elle est une figure emblématique de la Commune de Paris de 1871 et a joué un rôle crucial en tant que militante, éducatrice et écrivaine. Surnommée la « Vierge rouge », elle a défendu les idéaux de justice sociale, d’égalité et de liberté tout au long de sa vie.


Louise MICHEL, la vierge rouge (1/3)

Louise Michel a été surnommée la « Vierge rouge » en raison de son engagement fervent et inébranlable pour la cause révolutionnaire et anarchiste. « Vierge » fait référence à sa pureté d’intention et à son dévouement total à la lutte pour la justice sociale, tandis que « rouge » est la couleur du sang versé pour la cause.

A cette image de militante passionnée et incorruptible, prête à tout sacrifier pour ses idéaux, d’autres symboles lui sont associés : les œillets rouges es mouvements révolutionnaires et socialistes ou bien encore le drapeau noir de l'anarchisme.

Après la Commune de Paris, Louise Michel a embrassé les idées anarchistes, prônant une société sans État, basée sur l’entraide et l’autogestion. Elle a milité pour l’égalité entre les hommes et les femmes, défendant les droits des femmes à l’éducation, au travail et à la participation politique. Elle a toujours défendu les opprimés et les marginalisés, s’opposant à l’injustice et à l’exploitation sous toutes ses formes. Elle croyait fermement en l’importance de l’éducation et a ouvert plusieurs écoles libres pour offrir une éducation accessible à tous, indépendamment de leur origine sociale. Et durant son exil en Nouvelle-Calédonie, elle a soutenu les Kanaks dans leur lutte contre la colonisation française.

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Louise est née le 29 mai 1830 au château de Vroncourt-la-Côte, une petite commune située dans le département de la Haute-Marne, en région Grand Est (AD 52 n°4 page 51/70), qui ne compte par ailleurs que 169 vroncourtois et vroncourtoises en 1836.

« Le nid de mon enfance avait quatre tours carrées, de la même hauteur de bâtiment, avec des toits en forme de clochers. Le côté sud, absolument sans fenêtres, et les meurtrières des tours lui donnaient un air de mausolée ou de forteresse, suivant le point de vue.


Autrefois, on l’appelait la Maison forte ; au temps où nous l’habitions je l’ai souvent entendu nommer le Tombeau.
 
Elle est la fille de Marie Anne MICHEL, femme de chambre au château de Vroncourt.

Le propriétaire de ce domaine est Étienne Charles DEMAHIS (1762 – 1845) ; avec son épouse Louise Charlotte Maxence PORQUET, il a eu trois enfants : Louise Agathe (1798 – 1847) qui deviendra Baronne de Kinkelin par son mariage avec Jules de KINKELIN-PELLETAN, médecin, dont le père fut secrétaire interprète auprès du duc de Raguse, haut dignitaire à la Chambre des Pairs sous Louis XVIII, puis Etienne Charles (1802 – 1811) qui décédera à l’âge de 9 ans, et enfin Laurent ( 1799 – 1847), le père présumé de la petite Louise.

Bien que le père ne soit pas nommé dans son acte de naissance, Louise MICHEL est vraisemblablement la fille de Laurent DEMAHIS ; d’ailleurs, le grand-père s’occupera de l’éducation de sa petite-fille. Ce ne sont bien évidemment que des suppositions puisque Louise en parle peu dans ses Mémoires… que de secrets derrière ses murs de pierre ! Nos familles « ordinaires » n’ont donc rien à envier à ces notables….

Louise est une petite fille très entourée : de sa mère, sa tante, ses deux grands-mères « l’une lisant tout haut, les autres tricotant ou cousant. » Et puis son grand-père « racontant les grands jours, les luttes épiques de la première République, il avait des accents passionnés pour dire la guerre des géants où, braves contre braves, les blancs et les bleus se montraient comme meurent les héros : tantôt, ironique comme Voltaire, le maître de son époque, gai et spirituel comme Molière... ».

Ce grand-père décède en 1845, suivie de sa grand-mère paternelle en 1850. Le château a été vendu et a changé de propriétaires plusieurs fois. « Faute d’entretien, le vieux château à tourelles inhabité, finira par s’écrouler et ses pierres seront réutilisées pour diverses constructions dans la région ».

Dans ses Mémoires, Louise MICHEL parle avec affection de ce lieu hors du commun : «  dans un bastion du mur du jardin était un banc, où ma mère et ma grand-mère venaient pendant l’été, après la chaleur du jour. Ma mère, pour lui faire plaisir, avait empli ce coin de jardin de rosiers de toutes sortes. Tandis qu’elles causaient, je m’accoudais sur le mur. Le jardin était frais dans la rosée du soir. Les parfums, s’y mêlant, montaient comme une gerbe ; le chevrefeuille, le réséda, les roses exhalaient le doux parfums auxquels se joignait l’odeur pénétrante de chacune. »


Elle a coulé des jours heureux, mais au décès de ses grands-parents, la famille MICHEL a dû quitter les lieux. Louise a prépare ses examens d’institutrice, et commence à enseigner en 1853 à Audeloncourt, où résidait une partie de la famille maternelle ; puis elle s’en est allée sur Chaumont et Paris où elle était « sous-maitresse » jusqu’en 1866. C’est à cette période qu’elle s’essaye à l’écriture et envoie « des vers à Victor HUGO ».

Sa mère fut nommée tutrice, et Maître GIRAULT, notaire à Bourmont, subrogé tuteur, pour « l’empêcher de dépenser de suite les huit ou dix mille francs (en terres) » dont elle avait hérité.

« Dans ma carrière d’institutrice, commencée toute jeune dans mon pays, continuée à Paris tant comme sous-maîtresse chez Mme VOLLIER, 16 rue du Château-d’Eau, qu’à Montmartre, j’ai bien vu des jours de misère ; toutes celles qui ne voulaient pas prêter serment à l’Empire en étaient là. Mais je fus plus favorisée que bien d’autres, pouvant donner des leçons de musique et de dessin après les classes ». Les biens seront d’ailleurs vendus durant son séjour en Calédonie pour régler les dettes de Louise durant le siège de la Commune.

Installée à Paris, elle travaille donc comme institutrice, une profession-passion qui ne la quittera jamais. Elle s’essaye à l'écriture et la poésie et très vite, s'engage dans des causes politiques, notamment la défense des droits des femmes et des ouvriers et bien évidemment l’éducation pour tous.

Paris l’attire comme un aimant : « c’était à seulement qu’on pouvait combattre l’Empire. Et puis Paris vous appelle si fortement qu’on en sent l’impression magnétique. »

Depuis le 2 décembre 1852, date de la proclamation de Louis-Napoléon Bonaparte, désormais empereur des Français sous le nom de Napoléon III, le peuple parisien connaît l’austérité d’un régime autoritaire. La vie quotidienne est marquée par des pénuries alimentaires et des difficultés économiques, exacerbées par le siège de Paris par les troupes prussiennes.

Mais le 18 mars 1871, une émeute éclate ; sur la butte Montmartre, le peuple se soulève contre le gouvernement d’Adolphe Thiers - chef du gouvernement provisoire de la République - qui veut négocier la paix avec les Prussiens.

La Commune de Paris de 1871 ne durera que deux mois, du 18 mars au 28 mai 1871 ; pourtant, les femmes et les hommes étaient déterminés….


Un « conseil de la Commune », composé de 92 membres élus parmi des miliciens, des ouvriers, des hommes politiques républicains et des bourgeois opposés à la restauration de la monarchie avait mis en place plusieurs commissions pour gérer une république fondée sur l’égalité sociale.

Malgré sa courte existence, la Commune a pris plusieurs mesures :

  • La séparation de l’Église et de l’État le 2 avril,

  • Un système d’éducation laïque et gratuit pour tous les enfants,

  • Une politique de protection sociale pour aider les plus démunis,

  • Des fonctionnaires élus par le peuple,

  • Une armée permanente remplacée par une Garde nationale composée de citoyens,

  • La création de coopératives ouvrières pour promouvoir l’autogestion des travailleurs,

  • et enfin, n système de planification économique pour assurer la production et la distribution de biens essentiels.

Mais durant la « semaine sanglante » du 21 au 28 mai 1871, la Commune a dû faire face à la violente offensive du maréchal Mac-Mahon à la tête de ses troupes versaillaises ; ne voulant réprimer la Commune, Adolphe Thiers avait fui à Versailles…

Louise est très active sur les barricades et participe à plusieurs combats contre les forces de l’État ; elle prononce des discours enflammés et encourage les Parisiens à résister ; elle organise des services de santé pour les combattants et s’improvise infirmière.

Son dévouement, son courage et son engagement militaire lui vaudront de fortes représailles.

La semaine sanglante est sans précédent ; des milliers de communards sont assassinés ; les survivants sont arrêtés, jugés, condamnés à la déportation, voire fusillés.

La suite, nous la connaissons tous : Louise Michel est condamnée à la déportation dans une enceinte fortifiée, une mesure répressive à l’encontre d’une communarde, pour la punir, pour la briser…..

Mais, c’est mal connaître Louise Michel…. En Nouvelle-Calédonie, elle fera preuve d’une résilience incroyable, doté d’un esprit indomptable et rebelle. Pourtant, Louise s’adapte, demeure fidèle à ses convictions et continue à militer pour ses idéaux révolutionnaires.

Sa seule raison de vivre….

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Pour en savoir plus :

Louise Michel (Partage Noir)

Louise Michel (Geneastar)

Enterrement de Louise Michel en 1905 (INA)

Louise Michel (1830-1905) | Service historique de la Défense(defense.gouv.fr)

Louise Michel, militante anarchiste – L'Histoire par les femmes

Les livres de Louise Michel

L’invention de Louise Michel – 1 – La Commune de Paris (macommunedeparis.com)

MICHEL Louise [Dictionnaire des anarchistes] - Maitron

La Semaine sanglante, 21-28 mai 1871 - France (lacommune.org)

Les 150 ans de la Commune : les lieux emblématiques - Ville de Paris



Anatole Deibler et sa veuve

Le 18 septembre 1981 l’Assemblée nationale votait l’abolition de la peine de mort, d’après le texte de loi de Robert Badinter, alors garde des Sceaux et ministre de la justice sous le gouvernement de François Mitterrand : une page de l’histoire judiciaire française s’était définitivement tournée.

Parmi les figures les plus emblématiques de notre histoire se trouvent les bourreaux, ces exécuteurs des décisions de justice, qui ont exercé une profession à la fois redoutée, méconnue et entourée de mystère.

Depuis le Moyen Âge, les bourreaux occupaient une place singulière dans la société. Considérés comme des parias, ils étaient alors « indispensables » au bon fonctionnement de la justice de l’Ancien Régime et des siècles suivants. Leur rôle dépassait souvent celui de simple exécuteur : ils procédaient également à des actes de torture judiciaire, des châtiments corporels, ou encore à des tâches administratives liées à la justice.

La plupart des gens connaissent la longue lignée des « Samson »,célèbre dynastie de bourreaux qui a exercé en France du XVIIe au XIXe siècle. Le premier membre de cette famille à devenir bourreau fut Charles Samson, qui a commencé sa carrière à Rouen en 1675. La famille a ensuite continué à exercer à Paris jusqu'en 1847.

Charles Sanson a épousé Marguerite Jouenne, la fille du bourreau de Rouen, ce qui l'a conduit à entrer dans cette profession. La dynastie des Samson a marqué l'histoire en exécutant des figures célèbres, notamment durant la Révolution française. C’est peu dire si la guillotine a chauffé …..

Contrairement à ce que certains pourraient penser, le métier de bourreau nécessitait un apprentissage spécifique et une connaissance approfondie des techniques d'exécution : la transmission de métier de père en fils assurait donc une préservation des connaissances et des compétences, perfectionnées au fil des générations. Cette continuité permettait une stabilité dans l'exécution des sentences capitales et évitait ainsi des changements fréquents ou des incohérences dans la manière dont les exécutions étaient menées.

A partir de 1870, deux réformes sont mises en application : d’une part, l’échafaud est supprimé, et d’autre part, l’État ne conserve plus qu’un seul exécuteur en chef tandis qu’avant il y avait un bourreau par siège de Cour d’Appel.

Avec le XXème siècle, et particulièrement après la Seconde Guerre mondiale, la peine capitale a progressivement perdu son caractère d'outil judiciaire incontournable. L'évolution des mentalités, la montée des droits de l’homme et les débats politiques ont fini par rendre obsolète cette pratique, reléguant les bourreaux à l’histoire.

L’abolition de la peine de mort a ainsi mis un terme à une profession unique en son genre, profondément enracinée dans l’histoire judiciaire et sociale de la France. Ces hommes, les bourreaux, longtemps à l’ombre des tribunaux, ont aujourd’hui disparu, mais leur rôle mérite d’être connu pour mieux comprendre les évolutions du système judiciaire français.

A défaut d’un pendu ou d’un roi, vous avez peut-être un bourreau dans votre arbre….

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Sous la Révolution française, la guillotine est devenue le symbole de l’égalité devant la mort et l’instrument principal des bourreaux. Des noms comme Charles-Henri Sanson ou Anatole Deibler sont restés dans les mémoires, incarnant une fonction où la technique, la rigueur et le sang-froid étaient essentiels.

Anatole DEIBLER est le premier exécuteur en chef des arrêts criminels. Il sera ensuite suivi de Jules Henri DESFOURNEUX (1877 – 1951), de André OBRECHT (1899 - 1985) et enfin de Marcel CHEVALIER (1921 - 2008).

Anatole DEIBLER était connu pour sa rigueur et son professionnalisme dans l'exercice de ses fonctions. D'ailleurs, dans ses carnets, il a tout scrupuleusement bien noté. 

Fidèle à son devoir, il ne se déplaçait jamais sans sa guillotine, outil indispensable à son métier. Celle-ci l'accompagnait lors de chacun de ses déplacements, soigneusement démontée, transportée dans des caisses et réassemblée sur place par ses soins ou avec l'aide de ses assistants. Cette précaution garantissait que l'exécution puisse être réalisée sans encombre, selon un rituel bien rodé. Pour Deibler, la guillotine représentait à la fois un symbole de sa mission et un instrument technique qu’il devait maîtriser à la perfection.

La guillotine était surnommée « la veuve » en raison de sa capacité à « épouser » les condamnés, c'est-à-dire à les séparer définitivement de leur vie. Ce surnom met en avant l'idée que la guillotine « prend » les personnes pour les tuer, tout comme une veuve perd son mari.

Ce surnom est également une métaphore funeste qui reflète la finalité et l'irréversibilité de la peine de mort.

Anatole DEIBLER est né le 30 novembre 1863 à Rennes en Ile-et-Vilaine.

Descendant d'une longue lignée de bourreaux, Anatole Deibler eut une carrière aussi longue que prolifique : en 54 ans, il exécuta près de 400 personnes parmi lesquelles plusieurs grandes figures du crime ; même s’il demeure le bourreau le plus célèbre, il n’en demeure pas moins le « gardien d’un horrible rituel médiéval transposé dans le monde moderne de l’automobile, des avions, de l’industrialisation et des médias de masse ».


En étudiant le personnage d’Anatole Deibler, figure emblématique d’un métier sinistre et controversé, j’ai plongé dans une époque où la peine capitale incarnait encore l’autorité suprême de l’État. Mais au-delà du personnage et de l’histoire, il convient de rappeler que la guillotine, perçue à tort comme un symbole d’humanisation de la justice, reste avant tout un acte de barbarie. Elle témoigne d’un temps où l’on croyait résoudre les maux sociaux par le sang. Aujourd’hui, ce chapitre sombre de notre histoire nous invite à réfléchir sur la valeur de la vie humaine et sur les dérives possibles d’une justice aveugle. 

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Pour en savoir plus :

Peine de mort en France — Wikipédia

Généalogie d'une famille ordinaire: Monsieur de Paris de EmmanuelROBERT-ESPALIEU

Les familles JOUENNE et SAMSON, bourreaux de père en fils - CercleGénéalogique du Pays de Caux - Seine-Maritime

Abolition de la peine de mort en France : chronologie | vie-publique.fr

Les Bourreaux de France - le métier si particulier des exécuteurs deshautes-œuvres - Les Chroniques de l'Histoire

La peine de mort en France : Deux siècles pour une abolition(1791-1981) 1/3 | Criminocorpus

Les dynasties de bourreaux, exécuteurs de pères en fils | FranceCulture

La guillotine, une invention humaniste? | France Culture

La famille Sanson, bourreaux de père en fils (Un jour de plus à Paris)

Généalogie d’Anatole Deibler (Geneastar)

Anatole Deibler's 400

Le voyage de la veuve | Film français complet - YouTube


lundi 23 décembre 2024

Louis François HERBEZ (1862 - 1912)

Parmi les généablogueurs, il est de « coutume » de raconter l’histoire du Sosa de la nouvelle année ; cette année par exemple, il fallait présenter son Sosa 2024 ; mais pour ceux qui n’ont pas encore autant d’ancêtres sur leur arbre, ils peuvent choisir leur Sosa 24 ; vous l’avez bien compris, l’objectif est d’écrire, d’identifier et d’explorer un aïeul spécifique ; c’est un excellent moyen de progresser dans votre recherche généalogique et de découvrir de nouvelles branches dans votre arbre.

Au mois de décembre, alors que le Challenge AZ 2024 s’achevait, j’ai dû précipitamment changer de plateforme ; passer d’Eklablog à Blogger fut une épreuve supplémentaire, mais je crois m’en être plutôt pas mal sortie en faisant du tri parmi les articles intéressants. Je me suis aperçue que j’avais écrit des textes sur la branche lensoise qui n’étaient plus du tout d’actualité ; au cours de mes recherches, j’ai fait de nouvelles « trouvailles » donc, je reprends mes articles un à un….

Mon SOSA 24 est Louis François HERBEZ, mon AAgrand-père maternel ; la famille HERBEZ vit sur les terres lensoises depuis au moins 1752.

En 1750, Lens est une petite commune rurale de l’Artois, dont l’économie est basée sur l'agriculture et l'élevage. Jusqu'au début du XIXe siècle, la plaine de Lens est peu favorable, et les cultures très pauvres. Il faudra attendre l’arrivée de Guislain Decrombecque sur le terrain, cultivateur et notable de la région, pour entreprendre l’enrichissement de la terre par de la fumure de son invention et ainsi rendre fertile la terre. Il devint maire de sa ville natale pendant dix-neuf ans, de 1846 à 1865.

Lens a commencé à se développer industriellement à la découverte de gisements de charbon en 1841.

Le 14 août 1849, mon AAAgrand-père épouse Eléonore ; elle a 23 ans et Prudent en a 27 ; de cette union naîtront 10 enfants dont seulement 3 atteindront l’âge adulte :

  • Prudent Émile, né le 07 juin 1850 et décédé le 06 février 1852 à 7 heures du soir, à l’âge de 20 mois,

  • Clémence Eléonore, née le 29 novembre 1851 et décédée le 05 février 1852 à 11 heures du matin ; elle n’a que 3 mois...

Les deux enfants ont été emportés à un jour d’intervalle ; l’hiver 1851-1852 a été particulièrement glacial.

Dès le début de novembre 1851 sont apparues les premières neiges dans les plaines du Nord et très certainement les jeunes enfants n’ont pu survivre à une saison aussi rigoureuse dans un logement souvent mal chauffé ; et que dire d’une éventuelle disette…. Les récoltes sont souvent mauvaises et le froid transpercent les vêtements.

Le suivant, Charles Henry, n’aura pas plus de chance : né le 24 décembre 1852, il décède le 10 janvier 1853 à 7 heures du soir : il n’avait que 15 jours ; après une vague de chaleur caniculaire en été 1852, succède de nouveau un épisode de froid et de neige début 1853 ; les enfants en bas n’y survivent pas.

Angélique Emilie nait le 4 décembre 1853, suivant de très près le décès de son petit frère ; elle sera une enfant plus vigoureuse ; à l’âge adulte, elle épousera Edmond Augustin DELOBEL dont elle aura 9 enfants nés entre 1873 et 1887.

Joseph Henry arrive le 18 avril 1856 mais décède le 06 février 1858 à l’âge de 22 mois : encore un hiver froid et verglacé ?

Pauline Henriette est née le 02 octobre 1858 et décédera le 21 octobre 1871 à 11 heures du soir ; la jeune fille avait 13 ans…. Puis vient Théodore le 23 janvier 1861 ; il mourra 12 mois plus tard : des hivers qui passent et se ressemblent par leur intensité…

Lorsque Louis François HERBEZ nait le 13 novembre 1862, il ne reste dans la fratrie que Angélique 9 ans et Pauline 4 ans. Bien malgré lui, mon AAgrand-père est l’ainée masculin de la famille….

Après lui, naîtra Alfred, le 21 juin 1865 mais qui s’éteindra le 21 avril 1867 à 3 heures du soir soit 22 mois plus tard ; si le début de l’hiver s’avère exceptionnellement doux en ce début de février 1867, il ne tarde pas devenir très menaçant dès le mois de mars, avec des pluies verglaçantes et de la neige.

Louis François accueillera un nouveau petit frère, le 26 mars 1867 ; Eugène sera le dernier de la petite fratrie car Eléonore a déjà 41 ans….

Le climat ne peut être la seule explication de ces décès successifs ; la mort prématurée peut être la conséquence d’une maladie infantile que l’on ne savait pas encore soigner, ou bien une épidémie. Entre 1840 et 1871, les Français subissent trois pandémies de choléra…La mortalité demeure importante à cause du manque d’hygiène, des logements insalubres et bien évidemment des maladies telles que rougeole, scarlatine, typhoïde, tuberculose, grippe, coqueluche, oreillons, variole…. La liste est d’autan plus longue que la précarité est installée et que les soins ne peuvent être dispensés.

Louis François n’a que 6 ans lorsque son père décède… A t-il été à l’école des corons ? A t-il écourté sa scolarité du fait du décès de son père ? Je ne suis pas en mesure de le dire, toujours est-il que sur sa fiche matricule, il est mentionné : « degré d’instruction : 0 et service militaire non exercé ».

Et puis, à y regarder d’un peu plus près, je m’aperçois qu’il sait à peine signer les actes d’état civil, tandis que son frère Eugène sait écrire. Mais Louis François est volontaire et le travail ne lui fait pas peur.

Si son grand-père Dominique Eugène était « pannetier et fileur de coton », son père Prudent « maçon et marchand épicier », Louis François profite des embauches massives de la Société des mines de Lens, pour exploiter les concessions de Lens et Douvrin

En 1870, il n'y a pas de loi stricte sur l'âge minimum pour travailler dans les mines en France – sauf la loi du 21 mars 1841 non respectée ; il est courant que des enfants commencent à travailler dès l'âge de 6 ou 7 ans car leur petite taille permet de se faufiler dans les galeries étroites. En plus, ils sont une main-d'œuvre bon marché et facile à contrôler.

Et même si les enfants sont soumis aux mêmes conditions de travail que les adultes, souvent travaillant de longues heures dans des conditions dangereuses, sa mère Eléonore n’a pas d’autres choix que d’envoyer son fils dans les « boyaux » si elle veut remplir la gamelle tous les soirs…. La famille a besoin de revenus supplémentaires pour survivre.

A ses 20 ans, Louis François est recensé, mais « fils aîné d’une femme veuve », il retourne dans ses foyers : ses foyers ?

En 1882, Louis François est déjà papa…. Son premier enfant Albert Louis – mon Agrand-père et SOSA 12 – est né le 15 novembre 1878 ; Louis François avait alors 16 ans ! Albert Louis et les trois enfants suivants portent le patronyme de leur maman, car le couple n’est pas marié.

Originaire de Carvin, Elisa TANCREZ s’est installée à Lens avec sa mère dans les années 1872, rue Neuve des Remparts.

Mais la grand-mère Clotilde laisse volontiers sa place à Louis François - qui n’a pas abandonné sa mère et navigue entre les deux foyers – mais s’installe définitivement avec Elisa dès que possible.

Lors de son mariage, le 26 février 1887, le couple HERBEZ – TANCREZ régularisera la situation et tous les enfants porteront désormais le nom de leur père.

Jusqu’en 1899, Albert Louis travaille pour les Mines de Lens ; ensuite, toute la petite famille s’installe à Sallaumines, dans la cité Embrase ; Albert Louis y occupera tantôt un poste de terrassier, tantôt celui de brasseur pour ensuite revenir au métier de mineur…

Une meilleure opportunité d'emploi ? Un salaire plus élevé ? Des conditions de travail plus sûres ou bien un logement plus spacieux pour tous les enfants ? La Compagnie des mines de Courrières qui gère les mines de Sallaumines a besoin de main-d'œuvre supplémentaire alors Albert Louis n’hésite pas.

Mais après la naissance de son douzième enfant, Eléonore – qui décédera à 22 mois, il revient à Lens, en qualité d’ouvrier-pompier. Son épouse Elisa a déjà 44 ans ; elle portera son dernier enfant Félix, qui mourra la même année que sa petite sœur, à seulement un mois d’existence….

La famille est revenue dans le berceau familial lensois ; la colère montait à Sallaumines et les forces de l’ordre ont été appelés par le Directeur de la Mine pour réprimer syndicats et ouvriers ; les mineurs se sont souvent mis en grève pour protester contre les conditions de travail difficiles, les bas salaires et les longues heures de travail. Albert Louis est allé voir si l’herbe était plus verte ailleurs, mais en fin de compte, il est rentré ; un retour qu’il ne regrettera pas lorsqu’il aura vent de la terrible catastrophe de Courrières le 10 mars 1906, la pire des catastrophes minières de l'histoire européenne ; un coup de grisou a ravagé environ 110 kilomètres de galeries communes aux fosses n° 2 à Billy-Montigny, n° 3 à Méricourt et n° 4-11 à Sallaumines ; cette explosion a causé la mort de plus de 1000 mineurs, dont beaucoup étaient des enfants.

Soucieux de préserver sa famille d’un climat de mécontentement et de tension, Albert Louis ne quittera plus sa ville natale.

Il s’éteindra à l’âge de 50 ans, le 21 décembre 1912.


Pour en savoir plus :

Mineur de Fond - Les corons

Le travail des enfants au XIX siècle

Mines de Lens. Archives nationales du monde du travail - Archivesnationales du monde du travail

Chronologie du travail des enfants — Wikipédia

Loi relative au travail des enfants employés dans les manufactures,usines et ateliers — Wikipédia

Courrières 1906, du drame à la colère (3/3) - Raconte-moi une archive(s) -Découvrir - Archives - Pas-de-Calais le Département