Mais son arrivée ne passe pas inaperçue…. La vieille tour qui domine le village se met à émettre un mugissement sinistre, alimentant les rumeurs et les superstitions des habitants. Car les villageois, rongés par la culpabilité et les non-dits, voient en Angelo un revenant vengeur, lié à la mort mystérieuse de son père.
Marie, l’amour de jeunesse d’Angelo, est désormais mariée à Martin, un grand blessé de guerre, et mère d’une fillette. Pourtant, les sentiments entre elle et Angelo n’ont jamais disparu. Le dilemme moral s’installe : osera-t-elle briser les chaînes de la raison pour retrouver l’homme qu’elle aime ?
Mêlant réalisme social et fiction dramatique, ce livre du « terroir » aborde les thèmes aussi variés que les séquelles de la guerre sur les corps et les âmes, le poids des secrets familiaux et des traditions, les amours contrariés et ses choix impossibles mais aussi l’exclusion dans les campagnes et la « peur de l’étranger ».
Certes les personnages sont fictifs mais ils représentent des archétypes humains : Marie, la femme sacrifiée (choix contraint par les circonstances), Martin, le mari blessé (l’homme humilié autant dans sa chair que dans son cœur), Angelo l’étranger (ah cette terrible xénophobie), le village hostile…. un village, replié sur lui-même, refusant l’intrusion dans ses secrets et ses douleurs.
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À la fin de la Grande Guerre, la France accueille ses soldats démobilisés dans un climat de deuil national, de souffrance collective, et de désillusion. Mais tous les Poilus ne reviennent pas avec les mêmes stigmates : certains, physiquement indemnes, suscitent une méfiance sourde, voire une hostilité ouverte.
Dans les villages meurtris, où les mutilés et les veuves sont légion, le soldat qui revient sans blessure visible est parfois perçu comme « chanceux » ou bien « lâche », suspecté d’avoir fui le front, d’avoir été protégé par des passe-droits, voire d’être « un suppôt de Satan » - comme Angelo – que le curé du village n’hésitera pas à fustiger, emmuré dans ses croyances populaires et religieuses.
Toutefois, ce roman est cru, dur ; les personnages sont confrontés à des situations extrêmes et l’auteur, sans embellissement, rend les émotions brutes et les injustices palpables. Ces « gueules cassées », ces mutilés sont impitoyables et la scène du massacre de Pinard, le chien d’Angelo, est d’une cruauté insoutenable.
Le roman est d’un réalisme sans fard, qu’il est quelquefois insupportable de lire, tant les superstitions sont omniprésentes et intolérables dans notre société d’aujourd’hui : on ne peut comprendre pleinement sans tenir compte du contexte.

