Il n’est pas exclu que, tel Jean Genet, l’un de vos ascendants ait été marqué par un passage à la Petite Roquette ou à Mettray.
Voici deux podcasts intéressants qui évoquent sa vie d’enfermement et d’errance :
Une enfance perdue : épisode 1/4 du podcast Jean Genet, l'art de lafugue | France Culture
Écrire sous écrou : épisode 2/4 du podcast Jean Genet, l'art de la fugue | France Culture
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Jean GENET est né le 19 décembre 1910 à Paris 6ème (AD 75 n°3218 page 5/21) ; il est le fils de Camille Gabrielle GENET, gouvernante, domiciliée au 1 rue Broca ; le père est non nommé…
Abandonné par sa mère à quelques mois, pupille de l’État, il est élevé dans une famille paysanne du Morvan ; il est aisé de retrouver sa trace dans les archives parisiennes :
Sur ce dernier document s’étale la chronique d’une jeunesse tourmentée : hospitalisations, placements multiples, fugues, vols, et séjours en prison rythment les premières années de Jean Genet.
C’est d’ailleurs en détention qu’il commence à écrire : « l’écriture est ce qui vous reste lorsque l’on est chassé du domaine de la parole donnée ».
Très tôt, Jean Genet découvre dans l’écriture un refuge, une échappatoire à un monde qui l’a rejeté avant même qu’il ait pu s’y inscrire. Orphelin, marginal, condamné, il est exclu des cercles sociaux, des institutions, des normes. Mais là où les portes se ferment, les mots s’ouvrent.
L’écriture devient pour lui un territoire clandestin, un espace de réinvention où il peut transfigurer la honte en beauté, la déviance en grandeur. Dans ses romans, ses poèmes, ses pièces, Genet ne cherche pas à se justifier : il sublime. Il érige les voleurs, les prostitués, les traîtres en figures tragiques et bien réelles ; ce geste littéraire est une revanche contre l’ordre établi, une manière de reprendre possession de sa propre histoire.
Il ne se contente pas d’écrire : il s’écrit. Il fait de sa vie un matériau brut, qu’il façonne avec une audace rare, jusqu’à scandaliser. Car Jean Genet a choqué par ses thèmes : l’homosexualité, la prostitution, la trahison, la criminalité… Il ne les évoque pas en marge, il les érige en grandeur. Ses romans comme Notre-Dame-des-Fleurs, Le Journal du voleur ou Pompes funèbres ont été censurés, jugés immoraux - déplacés pour une société bourgeoise et bien établie - mais aussi admirés pour leur audace stylistique et leur puissance poétique.
On peut légitimement se demander ce qu’a vécu ce garçon, quelles violences ont marqué son regard pour qu’il écrive avec une telle brutalité...




