mercredi 20 août 2025

Fleur de tonnerre de Jean TEULE

Ce roman retrace la vie romancée d’Hélène Jégado, une tueuse en série bretonne du XIXe siècle, considérée comme l’une des plus prolifiques de l’histoire française. Née en 1803, surnommée Fleur de Tonnerre par sa mère, elle grandit dans un univers imprégné de légendes celtiques, de superstitions, et de la figure de l’Ankou, personnification de la mort en Basse-Bretagne.

Convaincue d’être l’instrument de cette entité funèbre, Hélène parcourt la Bretagne pendant près de vingt ans, se faisant employer comme cuisinière dans des presbytères tout d’abord, puis des maisons bourgeoises – et même une auberge militaire !… et empoisonne méthodiquement ceux qui croisent sa route — hommes, femmes, enfants, vieillards — à l’arsenic « reusenic’h », intelligemment dissimulé dans ses soupes et plats.

Une « soupe aux herbes à en tomber le front dans l’assiette, gâteau émerveillant à s’en attraper la gorge à deux mains »… et ce n’est pas peu dire !

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Jean Teulé mêle humour noir, poésie macabre et réalisme historique pour dresser le portrait d’une femme à la fois monstrueuse et fascinante, nourrie de folklore et de solitude.

Si ce livre est quelquefois déroutant à la lecture, tant le style de Jean Teulé est très oral, rythmé et parfois cru, les nombreux dialogues nous plongent dans les mentalités populaires, et les expressions bretonnes ajoutent de l’authenticité ; elles peuvent toutefois freiner la compréhension. Certains termes comme Ankou, gwerz, ou fleur de tonnerre ont une forte charge symbolique et appartiennent au « brezhoneg ».

Mais ce roman est intéressant à plein des égards : il se déroule en Bretagne au XIXe siècle, une période riche en mutations sociales, religieuses et culturelles ; il offre un aperçu de la vie quotidienne, des métiers, des structures familiales, et des relations sociales dans les campagnes bretonnes. On y découvre les affres de la « fièvre, choléra, malédiction…. Car la Bretage est pétrie de mauvais sorts et de légendes de toutes sortes ».

Hélène Jégado a traversé de nombreuses communes bretonnes où elle a laissé quelques traces : Plouhinec, Bubry, Seghien, Trédarzec, Guern, Locminé, Auray, Pontivy, Hennbont, Lorient, Ploemer, Port Louis, Vannes et Rennes. Cela peut aider, éventuellement, à localiser des ancêtres ou à comprendre les migrations internes dans la région à cette époque.

Le roman est imprégné de folklore breton, notamment autour de l’Ankou, des superstitions, et des rites funéraires. Hélène Jégado vivait « au milieu des ombres des Korrigans et des fées « ; ces éléments peuvent éclairer les mentalités de l’époque et les pratiques religieuses qui influençaient les actes civils (baptêmes, mariages, décès).

Malheureusement, il faudra attendre les 4/5 du livre pour arriver à son arrestation le 2 juillet 1851, à Rennes. Après une série de décès suspects dans la maison de Théophile Bidard de la Noë, « professeur de droit à la Faculté de Rennes et ancien Substitut du Procureur de la République », Hélène Jegado est soupçonné d’empoisonnement.

Le procès s’ouvre le 6 décembre 1851, devant la Cour d’assises d’Ille-et-Vilaine ; elle est jugée pour 27 empoisonnements, mais la justice ne retient que 5 meurtres, les autres étant prescrits. Malgré son déni total des faits, les preuves médico-légales et les témoignages accablants suffisent à convaincre les jurés.

Au procès, elle apparaît « renfrognée, front bas et dur, devenue laide comme une sorcière qui se serait échappée de la lande bretonne »…..

Elle est condamnée à mort le 14 décembre 1851 ; sa grâce étant refusée par Louis Napoléon Bonaparte, elle est guillotinée le 26 février 1852, à 7h du matin, sur la place du Champ-de-Mars à Rennes, devant une foule immense.

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Ainsi, Hélène Jégado a réellement existé : elle est née le 17 juin 1803 (28 Prairial An XI) à Plouhinec, en Basse-Bretagne ; un généalogiste pourrait être intrigué par son arbre généalogique, ses origines familiales, ou même par des liens collatéraux avec des familles locales, et susciter des recherches dans les archives judiciaires, paroissiales, ou d’état civil. Ce ne sont pas les récits qui manquent !

Si vous faites des recherches en Bretagne ou avez des ancêtres du XIXe siècle dans cette région, ce roman peut être une porte d’entrée originale pour mieux comprendre leur environnement.

La vie d’Hélène Jégado est surprenante. Alors folie ou croyance morbide ?

Hélène Jégado entretenait une forme de délire mystique autour de la figure de l’Ankou, le messager de la mort dans la tradition bretonne. On peut aisément supposé qu’elle aurait été traumatisée dès l’enfance.

Figure obsédante, l’Ankou est un personnage du folklore breton, souvent représenté comme un squelette vêtu d’un manteau noir, conduisant une charrette pour emporter les âmes des morts. Elevée dans une Bretagne rurale engluée de légendes, marquée par la ferveur religieuse, Hélène Jégado se serait identifiée à l’Ankou, se voyant comme une élue de la mort, chargée d’accomplir une mission funèbre.

Mais elle n’a jamais été reconnue «  folle » au sens juridique du terme, mais fallait-il encore avoir la notion « d’irresponsabilité » à cette époque ; elle nie tous les faits jusqu’au bout, sans jamais exprimer de remords, ce qui a renforcé son image de femme froide, calculatrice, lucide. De même, son comportement — son calme face à la mort, son obsession pour les enterrements, et son goût pour les poisons — laisse penser à une personnalité « pathologique », peut-être marquée par des troubles psychiques non diagnostiqués. Car elle le dit : « elle est devenue l’Ankou pour devenir quelqu’un d’important », égarée dans les légendes bretonnes….

Elle a été guillotinée à 48 ans.

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Pour en savoir plus :

Plouhinec : Histoire, Patrimoine, Noblesse (commune du canton de Pont-Croix)

Portrait d'une condamnée à mort- Hélène Jégado - Champs de Justice

Archives et patrimoine de Lorient: Jégado Hélène

Hélène Jégado (Archives du Morbihan)

Accueil − Portail numérique de la langue bretonne

Hélène JEGADO : généalogie par Antistar (antistar) - Geneanet

Hélène Jégado (Archives du Morbihan)

Portrait d'une condamnée à mort- Hélène Jégado - Champs de Justice

Hélène Jégado, 1833-1851 - L'Ankou en chair et en os

Hélène Jégado, l'empoisonneuse en série, aux Assises de Rennes —WikiRennes

Hélène Jégado, l’empoisonneuse en série | ici

L'Ankou : Le messager de la mort - Légende de Bretagne

#03 - L’affaire de l’Ankou de Plouhinec - #FrenchHorrorStory #Horreur #threads #HorreurFrançaise - YouTube

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