dimanche 22 juin 2025

Une soupe aux herbes sauvages de Emilie CARLES

Voici un livre autobiographique comme je les aime tant ! Émilie CARLES, institutrice de métier, nous plonge dans sa vie et l'évolution de la société rurale française au début du XXe siècle. Le livre est un témoignage vivant de son enfance et de sa jeunesse à Val-des-Prés, petit village de la vallée de la Clarée, région montagnarde des Hautes-Alpes.

Issue d'une famille paysanne modeste, Émilie décrit avec force et authenticité les conditions de vie difficiles de l'époque : la rudesse du travail de la terre, la solidarité villageoise et l'importance de l'entraide, la frugalité du quotidien, symbolisée par cette fameuse « soupe aux herbes sauvages » qui nourrissait les familles. Elle dépeint un monde où la nature est omniprésente, à la fois généreuse et impitoyable.

Le cœur du récit réside dans son désir d'apprendre et de transmettre. Malgré les obstacles, Émilie poursuit ses études pour devenir institutrice, un métier qu'elle exercera avec passion et conviction. Elle se bat pour une éducation laïque, gratuite et obligatoire pour tous, prônant l'égalité des chances et l'émancipation par le savoir. Son combat s'inscrit dans un contexte de profonds changements sociaux et politiques en France.

À travers son regard, on découvre les transformations du monde rural, l'arrivée du progrès mais aussi la perte de certaines traditions. Le livre est une ode à la résilience, à la dignité et à la force de caractère d'une femme qui a toujours cru en l'importance de l'humain et de l'éducation pour construire un avenir meilleur. C'est aussi un vibrant hommage à la culture montagnarde et à ses habitants.

« Une soupe aux herbes sauvages » présente un intérêt certain pour la généalogie, non pas comme une source directe de données nominatives précises pour établir une lignée, mais plutôt comme un complément essentiel à la compréhension du contexte de vie de vos ancêtres.

Émilie Carles décrit avec force détails la vie quotidienne dans une région rurale des Hautes-Alpes au début du XXe siècle, ce qui permet de mieux visualiser et comprendre les conditions de vie de ses ancêtres : la rudesse des travaux agricoles, les saisons, les cultures, les outils utilisés, l'importance du bétail, la vie au rythme de la nature, l'absence de confort moderne, la vie en autarcie, la dépendance vis-à-vis des ressources locales mais aussi le rôle de la communauté, les fêtes, les veillées, les mariages et les deuils.

Bien qu’il ne soit pas un livre d'histoire au sens strict, ce roman régional est imprégné des événements qui ont marqué la première moitié du XXe siècle en France : les deux guerres mondiales, les mouvements sociaux, et bien sûr la laïcité. Cela permet de comprendre les grandes lignes de l'histoire vécue par nos aïeux.

Vous l’avez bien compris, j’ai a-do-ré ce livre ; il exprime un esprit de liberté, d'indépendance, et de résistance face à l'autorité ou aux projets que l’auteure juge néfastes pour sa communauté et son environnement ; c'est une lecture très enrichissante qui offre une profondeur culturelle et sociologique à la recherche généalogique, un excellent complément aux données brutes des registres.

*

Émilie CARLES (1900 – 1979) était une femme avec un caractère bien trempé, très attachée à ses racines et à sa terre, et elle n'hésitait pas à se battre pour ses convictions. Son activisme pour la protection de la Vallée de la Clarée, tel que décrit dans son livre, reflète cette forme de contestation et de rébellion face aux normes établies ou aux décisions qu'elle estimait injustes.

*

Pour en savoir plus :


SOUPE AUX HERBES SAUVAGES - YouTube

CARLES Émilie [née ALLAIS Marie, Julie, Emilie] [Dictionnaire desanarchistes] – Maitron

Les Arcades – La maison d’Émilie Carles (Val-des-Prés) |Provence-Alpes-Côte d'Azur Tourisme

Les Arcades - La maison d'Émilie Carles - La Clarée

Panaït Istrati, roi des vagabonds, par Sébastien Lapaque (Le Mondediplomatique, juillet 2015)

Histoire des Escartons

La république des escartons de Briançon (1343-1789) – Famille Ginoux

Les Escartons du Briançonnais

Le journaliste et écrivain Georges de La Fouchardière, le militant Panait ISTRATI

Le militant anarchiste et syndicaliste Louis LECOIN

POULAILLE Henry (pseudonyme : Hyp) – Maitron

Théophile et Félix Berthalon, les frères insoumis des balmes –hautes-alpes-insolites

LA VIE QUOTIDIENNE DES PAYSANS ÉLEVEURS DE RÉOTIER VERS 1950 | LouisVolle

Écomusée 'la vie d'une famille paysanne autrefois': Hautes-Alpes

samedi 7 juin 2025

Jean BEAUJON (1880 - 1927) : une inexorable descente aux enfers (2/2)

Ma 1ère affectation était au 13ème régiment d’infanterie à l’ancienne caserne Pittié de Nevers, puis au 8ème groupe spécial du camp d’avor ( Avord dans le Cher ?) pour ensuite intégrer le 4ème bataillon d’infanterie légère d’Afrique : mes états de service m’avaient rattrapé. Faut dire que j’avais plus d’un tour dans mon sac, à l’époque.

C’est vrai que je voulais voir du pays, mais l’Afrique du Nord, c’est trop loin….

Le 4ème bataillon d'infanterie légère d'Afrique (4e BILA) est une unité pour les têtes brûlées comme moi, qu’y disait, des soldats avec des antécédents disciplinaires ou des condamnations, et hop, au loin dans les colonies…. Il paraît que l’état français a peur de nous… Peur ou pas, j’ai été débarqué à Gabès, en Tunisie, puis à Ain Sefra et Oran en Algérie.

A Gas, on recrutait, enfin on enrolait à tour de bras, pour l’effort de guerre, toujours l’effort de guerre ; au début, les gars s’engageaient volontairement ; on leur promettait une solde plus importante ou bien des rations alimentaires pour leur famille, mais très vite, ils se sont aperçus de la supercherie… Alors il a fallu aller les chercher et là, c’était autre chose….

Et à Oran et Ain Sefra, il fallait mater les insurrections tribales. On avait ordre de maintenir l'ordre colonial, surveiller les frontières, avec le Maroc ; on était un point d’appui pour les raids et des vols de surveillance dans le Sahara ».

Jean a dû quelquefois regretter l’oasis verdoyante de son Morvan natal, qu’il n’a pas hésité à fuir pour d’autres contrées françaises. Ses nombreuses sources, rivières, ruisseaux et lacs irriguent abondamment un paysage dominé par d'épaisses forêts de feuillus, entrecoupées de haies, de bosquets et de pâturages…. Si le Sahara est le plus grand désert chaud du monde, où l'aridité est la caractéristique dominante, façonnant des paysages à couper le souffle mais particulièrement impitoyables et inhospitaliers, la rareté de l'eau est sa marque de fabrique ; sa beauté est austère et sans aucune opulence végétale.


Ch’suis pas beaucoup allé à l’école mais je sais que j’étais loin de ma « Francine » ; j ’pensais à elle tous les jours, surtout lorsque je voyais les femmes…. »

Car des deux côtés de la Méditerranée, les femmes se retrouvaient au bord de l’eau, unies par un même labeur et des gestes ancestraux. Au Maghreb, elles s’installaient près des oueds pour laver le linge à la main. Dans les campagnes françaises, elles frottaient et brossaient leur linge à genoux, installées sur les berges des rivières ou autour des lavoirs communaux. Qu’elles soient kabyles ou provençales, bretonnes ou berbères, elles partageaient une même réalité quotidienne rude : l’eau glacée, le savon râpé, les draps lourds à battre sur les pierres, et souvent le poids du silence ou des confidences échangées entre deux éclaboussures.

Au lavoir ou à l’oued, ce sont les mêmes mains burinées, les mêmes gestes transmis de mère en fille, les mêmes chants parfois, portés par le clapotis de l’eau. Deux mondes, deux cultures, et pourtant une même scène, simple et forte : celle de femmes au travail, unies par le linge, l’eau, et la vie.

Une scène de la vie courante, mais Jean n’a pas le temps de rêvasser….

« Je suis resté jusqu’en août 1917 et ensuite l’armée a décidé de m’envoyer à La Courtine, dans le Cher, peut-être pour bonne conduite, faut dire que j’me tenais à carreau ; j’étais heureux de revenir en France mais il a fallu réprimer la mutinerie des Russes ; je comprenais bien leur refus de retourner au front et d’exiger leur rapatriement au bled, mais les ordres sont les ordres ; j’avais suffisamment dégusté et je ne voulais pas retourner en Algérie. Alors ils m’ont expédié dans la région de Monastir : le bataillon de l’Orient, qu’y nous appelait.

Et là, changement de décor : bombardements d'artillerie quasi-quotidiens, pilonnages à répétition… on était sous les feux de la rampe, comme on dit, juste en face des lignes bulgares et allemandes ; ça pleuvait des obus…. C’était un calvaire constant, marquée par les sirènes d'alerte, les abris, et la destruction généralisée. J’suis resté deux mois et retour en France, dans la Marne ; j’ne sais pas comment on a pu tenir….

Au printemps 1918, les Allemands lancent la Kaiserschlacht - l'Opération Michael - une offensive majeure sur le Front de l’Ouest ; c’était une tentative désespérée des Boches de remporter la victoire avant que les forces américaines ne fassent pencher définitivement la balance en faveur des Alliés. J’suis arrivé à Noyon en avril ; la ville était en ruine, mais durant des semaines on a tenu bon et les Tommies étaient bien contents de nous voir arriver en renfort….

En novembre 1918, on m’envoie au 5ème régiment de Génie de Versailles, un régiment de référence pour la pose, la réparation et l'exploitation des voies ferrées et des ponts de chemin de fer ; la guerre est finie, faut reconstruire…. »


« Parait que la guerre est finie, mais la France est en ruine… et l’Armée ne m’autorise pas à rentrer ; il faut encore contribuer à l’effort collectif…. »

Ce que Jean ne sait, c’est qu’il ne bénéficie d’aucune armistice pour les délits qu’il a commis dans les années précédentes et qu’il doit continuer à servir. En sa qualité de père de quatre enfants, il rentre enfin à la maison en avril 1919. Mais lorsqu’il est arrivé, Francine ne l’a pas reconnu, ni les enfants d’ailleurs : « je crois que je leur ai même fait peur... ». Jeannette a bientôt 16 ans, André 13 ans, Madeleine Louise 11 ans et Marcel 10 ans.

Jean pensait que tout allait recommencer comme avant, comme les fois où ils se retrouvaient dans la grange du père, couchés dans le foin. Mais Francine a changé…. Et lui aussi, peut-être.

La guerre avait laissé des traces indélébiles : l'alcool, omniprésent pour aider à supporter l'horreur des combats et le traumatisme de la destruction, a eu raison de lui. Jean rentre avec des séquelles profondes, un fardeau invisible qui l'accompagnera bien après le clairon de l'armistice.

Les retrouvailles ne sont pas à la hauteur de ses espérances ; Jean porte toujours le poids de la guerre, mais d'une manière que personne n'aurait imaginée. Chaque matin, le réveil est un supplice. Non pas à cause des cauchemars de tranchées, mais à cause de la douleur lancinante du manque. Sans sa boisson quotidienne, Jean ne tient pas. Son corps, habitué à des doses régulières et massives d'alcool, revendique désormais sa ration. Tremblements, sueurs froides, agitation... Le manque est devenu une geôle invisible dont il ne peut s'échapper. Si le « pinard » et la « gnôle » furent son réconfort face à l'horreur des combats, à la violence des bombardements et à la mort toujours omniprésente, est aujourd'hui une nécessité impérieuse, une dépendance qui le consume et le prive de toute paix.

Le logement est devenu un champ de bataille, où les cris et les injures ont remplacé le rire des enfants insouciants. D'un côté, il y a les hurlements et les insultes de leur mère ; l'épuisement, l'amertume et le désespoir d'une vie qui ne ressemble plus à ce qu'elle aurait dû être se manifestent par une colère constante et violente. Ses paroles, tranchantes comme des couteaux – lorsque Francine appelle Jean « Poche à vin » - lacèrent l'atmosphère et les âmes innocentes de ses enfants.

De l'autre, les railleries et les saouleries de leur père. Jean, prisonnier de son addiction, trouve dans l'alcool un refuge éphémère qui le pousse à des comportements blessants. Ses moqueries, parfois cruelles, et l'odeur entêtante de l'alcool qui l'accompagne, sont une source de confusion et de honte pour les enfants. Ils assistent impuissants à la lente déchéance de celui qui devrait être leur protecteur.

Ce qui avait été construit avec l'espoir d'un avenir meilleur s'est lentement effondré sous le poids des non-dits, des rancœurs et d'une dépendance qui consumait tout sur son passage. Les tentatives de réconciliation, si elles ont existé, se sont heurtées à un mur d'incompréhension et de souffrance. La colère de Francine, alimentée par le désespoir de voir son foyer détruit par l'alcool, ne faisait qu'attiser les tensions. De son côté, Jean s'enfonçait toujours plus dans la boisson, incapable de briser le cycle de sa dépendance, et trouvait dans l'alcool un refuge illusoire face à la réalité de son échec.

Pour Francine, le divorce est apparu comme la seule issue possible. Une décision douloureuse, mais nécessaire pour mettre fin à un cycle destructeur qui menaçait d'engloutir toute sa famille. Ce n'est pas une fin heureuse, mais plutôt l'amère conclusion d'une histoire brisée par les traumatismes de la guerre et les ravages de l'addiction.

Le divorce est prononcé le 4 novembre 1920.

Inutile de s'étendre sur un homme brisé, effondré par la guerre et la honte d'avoir tout perdu. Bien sûr, après avoir « bu » toutes ses indemnités de démobilisation, il a retrouvé un emploi de cordonnier, mais rien n’a plus été comme avant…..

Certains l'accableront d'avoir tout gâché, alors qu'il aurait pu finir sa vie auprès de sa famille. Mais d'autres comprendront que l'alcoolisme est une maladie, et qu'en aucun cas, il n'a fait le terrible choix de sombrer volontairement dans l'alcool. On parlerait aujourd’hui de « victime collatérale ». Ah l’alcool, « le vice », « la perversion », « la débauche », voici une vision très moralisatrice de cette société du début du XXème qui a contribué à le basculer inexorablement dans les limbes de l’oubli et de la culpabilité. Une descente sans fin où chaque goutte l'éloignait un peu plus du monde réel, de la lumière, de tout ce qui aurait pu le sauver.

Jean est décédé le 22 décembre 1927, seul, dans son appartement peuplé de démons : il avait seulement 47 ans.

*

Avant d’avoir fait de la généalogie, je n’avais entendu parlé de cet Agrand-père qu’en terme peu élogieux d’alcoolique avéré ; il est facile de s'arrêter sur les mots, de coller des étiquettes. Oui, Jean était alcoolique. Cette vérité, aussi dure soit-elle, est indéniable et a marqué son existence et celle de notre famille. Elle a été la cause de souffrances, de silences, et parfois de déchirures.

Pourtant, au-delà de cette maladie qui l'a consumé, il est essentiel de se souvenir d'une autre vérité, tout aussi fondamentale pour moi : Jean était avant tout mon Agrand-père. Et j’ai souvent beaucoup d’affection pour mes ancêtres, surtout pour ceux que l’on a dénigré, ignoré, fustigé…..

Il n'était pas seulement une collection de symptômes ou la somme de ses faiblesses. Il était l'homme qui m'a précédée, celui dont le sang coule dans mes veines. Peut-être qu'il portait en lui les échos lointains de la guerre, le poids d'un monde qui n'a pas su le rattraper. Comprendre l'alcoolisme comme une maladie permet de dépasser le simple jugement pour entrevoir la complexité de son parcours.

Reconnaître son alcoolisme ne signifie pas l'absoudre de tout, mais plutôt comprendre la profondeur de sa peine. Car l’alcoolisme est une souffrance….

Cela me permet de le voir non pas comme un défaut de caractère, mais comme une âme blessée, emportée par une dépendance qu'il n'a pu ou su combattre.

Pour en savoir plus :

L'abbé Baudiau, historien du Morvan(1809-1880) (Patrimoine du Morvan)

Le Morvand ou Essai géographique, topographique et historique sur cettecontrée (2e édition) / par J.-F. Baudiau,... | Gallica

La vie à Montereau de 1880 à 1920

Bataillons d'infanterie légère d'Afrique — Wikipédia

FRMAE 1TU/125, Protectorat français en Tunisie, cabinet du résident,1914-1920

Participation du soldat Tunisien – HMP

La mutinerie des soldats russes à La Courtine – YouTube

Le front d'Orient : 1915 - 1919 | Chemins de mémoire

La guerre des balkans (1915-1918) | Médiathèque du patrimoine et de la photographie

Jean BEAUJON (1880 - 1927) : une inexorable descente aux enfers (1/2)

Après m’être attardée sur l’histoire de Francine BAROIN, mon Agrand-mère paternelle – et SOSA 11 – voici mon Agrand-père et conjoint de Francine.

« Je m’appelle Jean BEAUJON ; je suis né le 2 avril 1880 à Gouloux, un petit village en Bourgogne. Je suis le 4ème enfant d’une fratrie de 10. Je suis né l’année de la mort du père Baudiau, ce curé célèbre pour ses écrits sur le Morvan. Ah Gouloux, le village des sabotiers, qui disent, mais il y a aussi beaucoup de propriétaires exploitants, des cultivateurs, des fermiers, deux instituteurs, un meunier, une blanchisseuse, une couturière, un aubergiste et un épicier, des nourrices bien sûr, des gens de maison (serviteurs et domestiques) et même quelques rentiers…

Mon père Claude est sabotier, mais moi, je quitterai cette région de misère ; je ne serai pas sabotier comme mon père ! Foutu métier, j’en ai même perdu une phalange à l’index droit… Moi, je ferai quelque chose de ma vie et j’irai voir du pays !

Et j’en ai vu du pays ! J’ai d’abord épousé ma « Francine » ; paraît que la « p’tite Jeannette » était en route, alors… On s’est installé à Chissey en Morvan, à 4 heures de marche de chez moi…. Ah, ne riez pas, j’ai plein de projets dans la tête….

Je ne suis peut-être pas un beau gosse, mais avec mon 1,61m et mes yeux gris, je l’ai emballée la « Francine » ; j’ai travaillé avec son père comme cultivateur mais j’avais besoin d’autre chose.

Je me suis fait prendre la main dans l’sac comme on dit ; j’avais écopé de 3 mois avec sursis en 1901 mais ma majorité m’a sauvée ; j’ai incorporé le 13ème RI comme soldat de 2ème classe ; et j’ai même reçu un certificat de bonne conduite ! 

A la fin du service, on a voulu reprendre un nouveau départ : avec Francine, on est parti pour Montereau-Fault-Yonne au 77 rue Grande ; on a laissé la gosse à mes parents, à Gouloux. Francine et moi, on a travaillé d’arrache-pied chez Belliot et on a pu racheter son café : une aubaine ! Je servais les gars et Francine faisait la cuisine.

On avait bien discuté ensemble : elle a pris le nom de Françoise et moi celui d’Adrien ; je trouvai que ça sonnait mieux. On avait enfin quelque chose à nous.


J’étais fier comme Artaban quand j’ai vu l’annonce Au Coq Hardi dans l’Informateur, le Journal Républicain régional et indépendant; je m’en souviens comme si c’était hier, on était le 25 avril 1908. Alors on a repris la p’tite Jeannette avec nous et on s’est installé rue Couverte, juste au dessus du café.

On a pris une bonne, Marie, pour s’occuper des gosses ; Jeannette a eu des frères et sœurs : d’abord André, Madeleine, René, puis la p’tiote Marguerite qu’a vécu que 3 jours et notre pauvre Alice qui est morte à 13 mois….

J’crois qu’on était pas malheureux, on mangeait à notre faim, on travaillait beaucoup, je ne sais pas ce qui m’a pris…. J’ai replongé et j’ai pris 13 mois de prison ferme pour vol par recel le 23 mai 1911.

En janvier 1912, on a redéménagé ; on s’est rapproché de la capitale, au 294 rue Etienne Marcel à Bagnolet. C’était difficile avec Francine, on se disputait souvent, elle me reprochait mon penchant pour l’alcool, et mes mois de tole. Elle ne s’en sortait plus avec les gosses ; faut dire que Francine, les gosses, c’était pas son truc…. On a repris notre travail comme ouvriers cordonniers ; Jeannette nous aidait bien. On était un peu à l’étroit dans notre logement, alors on est parti pour Montreuil-sous-Bois au 116 rue de Lagny….

Et puis, il a fallu partir à la guerre ; ils disaient qu’elle n’allait pas durer, qu’on allait leur donner une belle raclée aux Boches. Tu parles ! J’avais 33 ans et j’étais en train de perdre ma famille. Si j’avais su….»

vendredi 6 juin 2025

Francine BAROIN (1884 – 1956) : l'indépendance d'une femme morvandelle (2/2)

Après avoir laissé la petite « Jeannette » aux beaux-parents, à Gouloux dans la Nièvre, Francine et Jean s’expatrient à Montereau (dept Seine et Marne) ; ils travaillent dur, et l’opportunité leur offre sur un plateau un café-restaurant. Jean est ravi ; il tient le bar et la salle tandis que madame prépare les repas. Tout aurait pu aller pour le meilleur des mondes, seulement Jean est « un peu » trop penché sur la boisson et les tournées avec les clients n’en finissent pas.

Mais Francine tient bon ; elle a désormais quatre bouches à nourrir : André, Louise, Marcel et bien sûr Jeannette ; l’aînée est revenue auprès de ses parents ; elle est indispensable à Francine et seconde sa mère dans toutes les tâches ménagères, au détriment des devoirs de classe qu’elle est obligée de délaisser. D’ailleurs, Jeannette – ma grand-mère paternelle – apprendra à lire et à écrire avec ses propres enfants…...

1910, c’est la grande crue de la Seine ; Paris est inondée ; mais aussi Montereau et la rue Couverte ; il faut se déplacer en barque, repousser l’eau, nettoyer, et encore nettoyer toute cette boue charriée par le fleuve, pour accueillir correctement les clients…. Francine est épuisée ; elle ne sait pas encore qu’elle entre dans un cercle infernal dont elle mettra des années à se remettre…. Ou pas.

1911, elle perd la petite Yvonne, à quelques jours de vie seulement. Le couple se dispute souvent, Jean « boit le ménage » et Francine ne supporte plus le logement dans lequel ils devaient couler des jours heureux. Alors ils vendent tout et s’installent sur Bagnolet ; le couple perdra un nouvel enfant, Marguerite à 7 mois. Pourtant, Francine a tout fait pour la sauver, et seule, comme d’habitude ; les allers et retours à l’hôpital Hérold, tout en assurant son emploi de « chaussonnier » à l’usine n’ont rien changé. Bagnolet : toute la famille s’installe rue Etienne Marcel, à deux pas des Puces de la Porte de Montreuil ; depuis plusieurs années, il s’est développé ce que l’on appelle « la Zone » une bande de terrain abandonnée autour des fortifications de Thiers ; les « chiffonniers » viennent revendre des objets usagés, de la récupération, de quoi survivre un peu…. Ce sont des bidonvilles, des masures montées à la force des bras, faites de bric et de broc. Un endroit malsain….

1914, Jean part à la guerre. Oh il a déjà quitté quelquefois le domicile, entre deux gendarmes, pour trois à quatre mois. Francine n’en peut d'ailleurs plus des frasques de son mari, alors qu’il parte à la guerre, bon débarras ! Mais avant de partir, Jean installe toute la famille sur Montreuil, rue de Lagny.

Avec le temps et cette séparation forcée – car cette p….. de guerre dure ! – la tension s’est apaisée ; Jean envoie des nouvelles à Francine ; le couple se rabiboche, mais Francine se demande souvent si elle aime encore Jean….

Mais l’heure n’est pas aux épanchements ; la France est en pleine guerre, et Francine a bien d’autres préoccupations : elle a déménagé passage Thiéré, une petite ruelle où se sont installés des ferrailleurs, des ouvriers chaudronniers et quelques chiffonniers des Puces de Montreuil ; le quartier de la Roquette, où toute la famille a migré, appartient au 11e arrondissement de Paris, un quartier à dominante ouvrière où Francine se sent bien. D’ailleurs, au vu de ses maigres revenus, elle ne pourrait pas habiter ailleurs…. Certes, la densité de population y est très élevée, mais Francine y a retrouvé des nombreux « compatriotes ». 

Au XIXe siècle Paris a connu un afflux important de provinciaux, et les Bourguignons figurent parmi les groupes les plus importants à s'y installer avec les Auvergnats, les célèbres « bougnats » ; les Bretons ont plutôt investis le 14ème arrondissement et Montparnasse.

Et puis un matin de 1919, Jean est de retour. Mais celui qui franchit le seuil du domicile familial n'est plus tout à fait le même. Méconnaissable, le visage buriné et creusé par les privations, les vêtements sales, en loques et beaucoup trop grands pour son corps amaigri, il porte sur lui la fatigue de plus de quatre années d'enfer. Sale, épuisé, marqué jusque dans le regard, il ne ramène pas seulement sa silhouette efflanquée ; il a 39 ans et il rapporte avec lui les silences, les souvenirs, et les cicatrices invisibles d’un conflit qui a bouleversé sa vie.

Après l’euphorie des retrouvailles, le couple a eu du mal à se retrouver, chacun ayant vécu des expériences radicalement différentes ; si Francine a dû assumer de nouvelles responsabilités, tant au niveau du foyer, seule avec quatre enfants à charge, et son emploi en usine, Jean est revenu traumatisé, physiquement et psychologiquement, avec une grande difficulté à se réadapter à la vie civile et conjugale. Il faut dire que ses terribles années de guerre n’ont pas arrangé son alcoolisme et sa déchéance. Car avec l'alcool, ce sont aussi les insultes, les coups et les enfants ont peur.

Le couple n’a pu résister ni aux déviances aggravées de Jean ni à l’indépendance croissante de Francine ; le divorce sera prononcé le 4 novembre 1920 au Tribunal de Paris. Ainsi, à tout juste 35 ans, Francine commence une nouvelle vie.

*

Dans la famille, Francine a toujours été perçue comme indépendante, volontaire, « plus attachée à ses chats qu’à ses petits-enfants » dira plus tard mon père.

Pour moi, son parcours reste le témoignage poignant de la force des femmes face à l'adversité au début du XXème siècle, capables de tout sacrifier pour offrir un avenir à leur famille, et avancer coûte que coûte. Francine a fait le choix de ne pas revenir dans son Morvan natal ; elle laisse derrière elle ses racines et les souvenirs d'une vie révolue. Cette volonté marque une rupture nette avec son passé et une volonté farouche de ne pas regarder en arrière ; elle symbolise sa détermination à se concentrer pleinement sur l'avenir de ses enfants et le sien, sans les entraves du passé. Elle s’est ainsi forgée une nouvelle identité, celle d'une femme indépendante et travailleuse ; car Francine n’a jamais cessé de travailler. Même lorsqu’elle a épousé en secondes noces Léon Georges LAMBERT, le 7 janvier 1922.

Le nouveau couple s’installe à Montreuil ; Montreuil-sous-Bois est une ville en pleine mutation, accueillant de nombreuses usines et des populations ouvrières. Un choix stratégique ? Peut-être, car même si les conditions de travail restent difficiles et précaires – notamment au regard de la sécurité - les usines présentent des possibilités d'embauche importantes pour les femmes, souvent stables et potentiellement mieux rémunérées ; de plus, comparé à Paris intra-muros, Montreuil offre des logements plus accessibles pour une famille nombreuse.
Alors oui, après son divorce, elle aurait pu faire le choix de revenir dans son village natal, mais l’échec de son mariage n’aurait sans doute pas échapper au regard pesant et au jugement d'une communauté rurale plus traditionnelle. Loin de toute stigmatisation, la ville offrait une certaine forme d'anonymat et de liberté, propice à un nouveau départ.

*

Pour en savoir plus :

Coutumes et traditions. Mariage dans le Morvan. Noces morvandelles.Festivités, rituels, croyances mariés (La France Pittoresque)

Le mariage (Le MorvandiauPat)

Hôpitaux dans les années 1900 à Paris

Francine BAROIN (1884 – 1956) : l'indépendance d'une femme morvandelle (1/2)


Francine est née le 4 novembre 1884 à Chissey en Morvan, en Saône et Loire ; son frère Etienne a 7 ans et aide son père aux champs. Il est déjà un grand garçon, car à son âge, il ne porte plus les robes comme les filles, mais « la culotte » qui bascule des petits aux grandes personnes.

Son père Jean BAROIN est propriétaire au lieu-dit des Crots Barbizots et chacun doit s’acquitter de sa tâche, s’il veut manger. Les récoltes sont incertaines et malgré l’ardeur des agriculteurs, la terre morvandelle reste capricieuse ; lorsqu’elle accepte de donner ses graines, il n’est pas rare qu’elles soient trop petites ou bien rongées par les champignons de la carie et du charbon.

Certes, le Morvan est une belle région vallonnée, mais la paysannerie vit durement de ses récoltes. Tous les bras sont les bienvenus et les enfants ne doivent pas bouder le travail qui leur incombe.

Francine donc est née en plein battage des céréales ; sa mère Pauline BOIVILLE travaille durement dans la ferme, tandis que la « petiote » solidement emmaillotée se balance doucement, accrochée à une grosse poutre de la bâtisse. Il y a tant de choses à faire dans la ferme….

Si Étienne suit son père partout, Francine ne quitte pas les jupes de sa mère, qui lui apprend à traire les vaches, à nourrir les cochons, à s’occuper des animaux de la basse-cour, mais aussi à entretenir une maison, à faire le repassage et le raccommodage. Quelquefois, elle se rend au village pour aller à l’école, mais le bourg est très éloigné et sa mère a souvent besoin d’elle.

Ce que Francine préfère entre toutes les tâches, c’est accompagner sa mère au « lavoir » : le linge sale entassé dans une brouette, les voilà parties toutes les deux sur les bords du Ternin. Tandis que sa mère, assise dans un « triolo » (caisse en bois), les genoux protégés par de la paille, savonne, frappe le linge au battoir puis le rince, Francine laisse ses petits pieds effleurer l’eau claire. Avec ses yeux d’enfant, elle observe en silence les lavandières affairées. Mais plus que le claquement des battoirs, ce sont leurs bavardages qui captivent son attention.

Les voix se mêlent au chant de l’eau qui coule, chuchotant des secrets, commentant les nouvelles du bourg, échangeant rires et soupirs. Francine écoute, curieuse, recueillant chaque mot comme un trésor. Ici, on parle des voisins, des naissances, des disputes et des mystères qui animent les ruelles de Chissey. Elle ne comprend pas toujours tout, mais elle sait que le lavoir est un lieu où les vérités et les rumeurs s’entrelacent, tissant l’histoire du village à chaque éclaboussure. Il arrive que des femmes se « crêpent le chignon », les chamailleries vont bon train ; c’est d’ailleurs le lieu idéal pour apprendre tous les derniers potins du bourg, et quelquefois, prendre un bon bain toute habillée.


Francine rit de bon cœur en entendant toutes ces histoires ; elle rêve souvent d’un prince charmant, d’un instituteur par exemple ou d’un fonctionnaire qui l’aiderait à quitter le village. Francine ne veut pas d’un univers « rétréci » comme celui de sa mère. Mais dans ces temps-là, on ne parlait pas de soi ; aussi, Francine ignore tout de la jeunesse et des amours passés de sa mère, si seulement…..

Dans ses songes, elle n’est plus une simple fille du village, mais une jeune demoiselle vêtue de soie, invitée à un bal grandiose. Un prince au regard doux, d’un gris velouté, s’incline devant elle et l’invite à danser ; il est beau, noble et attentionné, bien différent des garçons bruyants du village. Elle habiterait un beau château, comme celui de Chissey, celui devant lequel elle passe pour aller au bourg….

Chaque soir, en fermant les yeux, Francine s’imagine quitter son village pour une vie où l’amour ressemble aux contes qu’elle aime tant. Un jour, peut-être, son prince viendra…

À dix-sept ans, Francine est frappée de plein fouet par la mort de sa mère en décembre 1901. L'hiver est rude dans le Morvan, et le désespoir l'envahit. Seule avec son père depuis le mariage de son frère Étienne en octobre avec Pierrette, son aînée de quatre ans, elle aspire à s'échapper, à vivre sa propre vie. Elle étouffe dans la chaumière….

Elle va la mener, cette vie, avec une précipitation qu'elle n'aurait sans doute pas imaginée. Jean, drôle et beau parleur, rêve lui aussi d'indépendance. Les jeunes gens tombent vite sous le charme l'un de l'autre. À peine les fiançailles scellées, la petite Jeannette est déjà en route. Comme on dit, c'est « un polichinelle dans le tiroir », et le mariage devient une urgence.

Mineure au regard de la Loi, Francine est autorisée à épouser Jean ; ce sera une belle fête car Etienne, son grand frère, est présent avec son épouse et sa première enfant Thérèse, âgée de plus d’un an. Mais Francine, bien qu’enceinte de quelques mois, n’est pas très ravie de son état ; elle n’a qu’une idée en tête : être autonome et quitter Chissey en Morvan.

Il n’est pas question pour Francine de « se mettre en nourriture » à Paris, c'est-à-dire d'aller allaiter les nourrissons de l'aristocratie ou de la bourgeoisie. Elle a vu trop de Morvandelles accueillir des bébés, à la chaîne, confiés par l'Assistance publique : dès qu’un nourrisson décédait, il fallait le remplacer pour garantir la survie de la famille…. Avec Jean, ils ont décidé de partir et de commencer une nouvelle vie, mais ailleurs. Quitter ce pays de misérables et s’essayer dans d’autres régions. 

lundi 2 juin 2025

L'île des oubliés de Victoria HISLOP

« L'île des oubliés » (The Island) de Victoria Hislop est un roman historique qui explore les secrets de famille et l'histoire tragique de la lèpre en Grèce, sur l'île de Spinalonga.

Le récit débute avec Alexis Fielding, une jeune Anglaise, déconnectée de ses origines maternelles et perturbée par le mutisme de sa mère, Sophia, concernant son passé en Crète. Pour tenter de comprendre ce silence et de dénouer les mystères familiaux, Alexis décide de voyager en Grèce, dans le village de Plaka, sur la côte nord de la Crète, d'où sa mère est originaire.

À Plaka, Alexis rencontre Fotini, une vieille amie de sa grand-mère. C'est Fotini qui va, petit à petit, lever le voile sur l'histoire douloureuse de la famille d'Alexis, une histoire intimement liée à l'île de Spinalonga, située juste en face de Plaka.

Spinalonga fut, de 1903 à 1957, une léproserie, une colonie où étaient déportés les malades de la lèpre afin de les isoler du reste de la population. Alexis apprend avec stupeur que son arrière-grand-mère, Eleni, a été touchée par la lèpre et a été contrainte de vivre sur cette île avec d'autres malades.

Le livre dépeint avec force la vie quotidienne sur Spinalonga : l'organisation de la communauté des lépreux, la résilience des habitants face à la maladie et à l'isolement, les efforts des médecins et infirmiers pour améliorer leurs conditions, et les liens complexes qui se tissent entre les malades et leurs familles restées sur le continent ; mais ce livre ne se contente pas de raconter une histoire humaine et familiale ; il intègre également l'évolution de la compréhension et du traitement de la lèpre tout au long du récit.

"L'île des oubliés" est une fresque familiale captivante qui met en lumière un pan méconnu de l'histoire grecque, tout en explorant les thèmes universels du destin, de la maladie, de l'exclusion, de la résilience humaine et de la force des liens familiaux.

Certes, l'histoire du livre "L'île des oubliés" de Victoria Hislop n'est pas une histoire vraie au sens strict d'un fait divers ou d'une biographie exacte. Ce n'est pas l'histoire d'une famille spécifique dont les noms et les événements se seraient déroulés exactement comme décrits. Mais bien que relaté avec des personnages fictifs, le roman est profondément ancré dans une réalité historique et géographique ; l’auteure a visité l'île et s'est longuement documentée sur son histoire et la vie de ses habitants.

N’oublions pas que durant des siècles – j’ai bien dit des siècles et peut-être encore aujourd’hui ! - la peur de la lèpre fut une combinaison redoutable de son apparence physique horrifiante, de son incurabilité perçue, d'une méconnaissance de sa contagiosité mais d'une certitude de son caractère transmissible, et d'une stigmatisation sociale et religieuse profonde. C'est cette peur qui a justifié et perpétué l'isolement des malades, considérés comme impurs et maudits, pendant des siècles….

*

Pour en savoir plus :

journal "l'étoile de spinalonga" - Recherche Google

(6) Spinalonga, 1927 – YouTube

Sur l’îlot de Spinalonga, en Crète, où les lépreux étaient parqués - Le Temps

La vie quotidienne dans la Léproserie - ΥΠΠΟΑ - Εφορεία Αρχαιοτήτων Λασιθίου

Podcast | Spinalonga, l’île aux lépreux

Spinalonga, voyage au cœur d’une île fascinante en Crète

Vies et morts d'un Crétois lépreux. Archéologie d'une arrogance - Epaminondas Remoundakis - Librairie Mollat Bordeaux

Bordeaux et la peste dans la première moitié du XVIIe siècle - Persée

Une nouvelle étude montre que la lèpre existait en Amérique bien avant l’arrivée des Européens