Faire
de la généalogie, c’est partir à la recherche de ses racines.
Mais c’est aussi naviguer entre clichés, préjugés et idées
toutes faites qui collent à la peau de cette passion.
Non, il
ne faut pas être vieux, riche, noble ou informaticien pour s’y
mettre.
Non, on ne passe pas ses journées à fouiller des
grimoires poussiéreux dans une cave.
Et non, la Révolution n’a
pas tout détruit !
Voici
donc un petit tour d’horizon (non exhaustif) de ces fausses idées
qui résistent encore… et qu’on va gentiment démonter, une par
une.
1/ Faire
de la généalogie est prétentieux
Sous
l’Ancien Régime, les nobles s’intéressaient à leur généalogie
pour bénéficier de certains avantages fiscaux et surtout,
obtenir
la faveur du Roi.
Au
19ème siècle, il n’y a plus d’avantages fiscaux, mais un statut
social à mettre en avant ! De grands bourgeois se mirent alors
à faire la généalogie de leur famille pour prouver l’ancienneté
de la « situation
avantageuse »
de leur famille.
J’ai
quelquefois entendu autour de moi,
que chercher ses ancêtres, c’est vouloir se « donner
un genre
», se croire un lien avec une noble lignée ou chercher à se
valoriser. Pourtant, la généalogie n’a rien à voir avec
l’orgueil !
C’est avant tout
une quête de mémoire. Une manière de comprendre d’où l’on
vient, de relier les fils du passé, et de redonner vie à celles et
ceux que le temps a fait tomber dans l’oubli. Ce n’est pas une
recherche de prestige, mais un travail de curiosité, d’humilité
et souvent, bien trop souvent… d’émotion.
Faire de la
généalogie, c’est aussi s’intéresser à l’Histoire avec un
grand H, à travers le prisme des vies ordinaires : celles de
paysans, de couturières, d’ouvriers, de soldats ou d’immigrés.
Des histoires simples, mais vraies. Des vies qui ont fait la nôtre.
Comme ma famille
ordinaire….
2/ Un
nom à particule exprime la noblesse
Certes,
les
patronymes
à particule, comme « de », « du », « d' »,
« le », « la », etc... sont souvent associés
à la noblesse, mais ils n'indiquent pas systématiquement une
origine noble.
Ils
peuvent être liés
à une origine géographique, comme
par
exemple, « de Montagne » peut signifier que la famille
venait d'une région montagneuse, sans qu'elle soit noble.
Les
particules étaient utilisées par des familles bourgeoises ou
paysannes pour indiquer un lien avec un lieu ou une propriété,
plutôt qu'un titre noble.
Est-il
nécessaire de préciser ici que pour confirmer
une origine noble, il faut généralement retrouver des preuves
concrètes, comme des lettres patentes, des enregistrements dans les
ordres de la noblesse ou des archives spécifiques.
N’oublions
pas qu’en généalogie, il est toujours préférable de se baser
sur des preuves plutôt que sur des suppositions.
3/ Les
familles ayant des armoiries sont nobles
À
l'origine, les armoiries étaient utilisées au Moyen Âge pour
identifier les chevaliers sur les champs de bataille ou lors de
tournois, mais elles ne signalaient pas nécessairement une
noblesse ; à
une époque où bien peu de personnes savaient écrire, même parmi
les chevaliers, les cachets armoriés ont servi de signature. On
trouve donc des armoiries utilisés par des bourgeois et des paysans
aisés dès le Moyen Age ; d’ailleurs les armoiries étaient
alors personnelles ; elles ne deviendront familiales que
beaucoup plus tard.
Bien
que certaines familles nobles aient des armoiries, des familles non
nobles ont aussi adopté des blasons pour symboliser leur métier,
leur région ou leur héritage culturel.
Les
artisans, commerçants et corps de métier avaient leurs propres
blasons pour représenter leur activité, sans lien avec la noblesse.
Si
les
armoiries sont un élément fascinant à explorer, mais elles ne sont
pas une garantie de noblesse.
4/ Faire
de la généalogie c’est vivre dans le passé
Chercher
ses ancêtres, ce n’est pas fuir le présent ni s’enfermer dans
la nostalgie. C’est au contraire un moyen de mieux comprendre le
monde d’aujourd’hui, à travers le parcours de celles et ceux qui
nous ont précédés.
C’est explorer
les choix, les épreuves, les espoirs et les migrations qui ont
construit notre histoire familiale, et parfois même nos valeurs, nos
traditions ou notre façon d’être.
La généalogie
n’est pas un retour en arrière, mais une passerelle entre les
générations. Elle nous relie, elle nous éclaire, elle nous ancre.
Elle donne du sens à nos racines, pour mieux avancer dans le présent
— et transmettre, demain, une mémoire vivante.
5/ Toutes
les archives ont été détruites à la Révolution
Il
est vrai que certaines archives, notamment seigneuriales ou
ecclésiastiques, ont été détruites — parfois brûlées par les
révolutionnaires, parfois perdues par négligence ou pillées. Mais
une immense partie des archives paroissiales (baptêmes, mariages,
sépultures) avait déjà été recopiée dans les registres d’état
civil à partir de 1792. Beaucoup de registres originaux ont
également été conservés.
Les
archives notariales, militaires, judiciaires ou cadastrales ont,
elles aussi, traversé les siècles. Et aujourd’hui, grâce au
travail de classement, de numérisation et de sauvegarde des services
d’archives départementales, il
est souvent possible de remonter jusqu’au XVIIe siècle, voire plus
loin.
Alors
non, la Révolution n’a pas tout emporté. Elle a marqué un
tournant, mais n’a pas effacé la mémoire.
6/ Faire
de la généalogie coûte cher
On
peut croire que la généalogie est un loisir réservé à ceux qui
ont beaucoup de temps… et d’argent. Pourtant, il
est tout à fait possible de débuter (et d’avancer !) sans
dépenser une fortune.
Bien
évidemment, si
à chacun de vos voyages généalogiques, vous descendez dans les
meilleurs hôtels de la région et que vous fréquentiez les
restaurants gastronomiques, vous
allez dépenser beaucoup d’argent !…
mais
vous aurez des souvenirs….
Les
bases de données des archives départementales sont en ligne, en
accès gratuit.
On peut consulter des registres paroissiaux, des recensements, des
actes notariés et bien d’autres documents sans bouger de chez soi.
Des
sites comme Geneanet ou Filae proposent des services payants, mais
aussi beaucoup de ressources accessibles gratuitement. Et surtout :
les
échanges entre passionnés sont souvent la plus belle richesse.
Forums, arbres partagés, entraide bénévole… La généalogie,
c’est aussi une grande communauté.
Alors
oui, on peut choisir d’investir dans un abonnement, des livres ou
des déplacements. Mais on peut aussi progresser pas à pas, avec
curiosité, patience et passion, sans
vider son porte-monnaie.
7/ Autrefois
les gens ne voyageaient pas beaucoup
On
imagine souvent nos ancêtres comme enracinés à vie dans leur
village natal. Pourtant, la
mobilité existait bel et bien,
même si elle prenait d’autres formes que les nôtres.
Certes,
certains ont passé toute leur vie dans un rayon de quelques
kilomètres. Mais d’autres
ont bougé par nécessité
: pour se marier, chercher du travail, fuir la misère ou les
guerres, s’engager dans l’armée, ou suivre les grands chantiers
(canaux, chemins de fer, mines…). Et n’oublions pas les grands
mouvements migratoires : exode
rural, émigration vers l’Amérique, déplacements saisonniers…
Même
au sein d’un département, on découvre souvent des ancêtres venus
d’ailleurs : du village voisin, d’une province éloignée, ou
même d’un autre pays.
Alors
non, ils ne prenaient pas l’avion… mais nos
aïeux bougeaient plus qu’on ne le croit.
Et
d’autres encore, sur la généalogie numérique !
8/ Les
tests ADN remplacent la recherche traditionnelle
Les
tests ADN peuvent être un outil intéressant en généalogie,
surtout pour retrouver
des branches perdues,
confirmer
une filiation
ou découvrir
des cousins inconnus.
Mais ils ne remplacent pas le travail patient de recherche dans les
archives.
L’ADN
peut dire avec
qui on partage des segments génétiques,
mais il ne peut pas dire qui
était votre arrière-grand-mère,
où elle est née, ni comment elle a vécu. Il ne donne ni dates, ni
lieux, ni histoires.
La
généalogie traditionnelle, avec ses registres, ses actes, ses
recensements et ses archives familiales, reste
la seule voie pour reconstituer une lignée complète et documentée.
L’ADN est un coup de pouce, un complément, parfois un déclencheur…
mais pas
un raccourci magique.
La
recherche d’ADN n’est qu’un complément d’informations.
9/ Les
outils numériques font tout le travail
Et
oui,
la généalogie a changé. Aujourd’hui, on peut consulter des
registres en ligne, utiliser des moteurs de recherche, créer des
arbres en quelques clics. Mais les outils numériques ne font pas
tout.
Ils
facilitent l’accès, mais c’est
à nous de lire, de vérifier, de comprendre : une
date mal transcrite, un homonyme, une mauvaise connexion automatique…
et l’erreur peut se glisser sans qu’on s’en rende compte.
Faire
de la généalogie, ce n’est pas cliquer sur un bouton et attendre
que l’arbre pousse tout seul. C’est interpréter
les documents, recouper les sources, faire preuve d’esprit
critique.
C’est aussi questionner, douter, parfois revenir en arrière pour
mieux avancer.
Les
outils sont formidables. Mais la
vraie richesse, c’est la rigueur du chercheur, sa
pugnacité…
et la passion qui l’anime.
Un
arbre en ligne généré en deux clics avec des correspondances
automatiques, ce n’est pas de la généalogie — c’est du
copier-coller de données parfois bancales. Quelques-uns
s’y sont essayés…. Mais ils se sont brulés les ailes, à
vouloir aller trop vite, à vouloir monter trop haut… Et il a fallu
tout recommencer !
Les
outils numériques sont utiles, puissants même. Mais ils ne savent
pas lire entre les lignes, débusquer une erreur de prénom,
reconnaître un ancêtre mal orthographié, ou deviner qu’il y
avait deux « Jean Clave » dans le même village
landais.
Faire
de la généalogie, c’est fouiller, croiser les sources, se poser
des questions, douter, recommencer. C’est
vous le cerveau, pas l’algorithme !
Bref
: les outils sont là pour vous aider, pas pour penser à votre
place...
10/ La
technologie moderne résout tous les blocages généalogiques
Spoiler
alert : même les logiciels les plus sophistiqués ne peuvent pas
faire parler un registre brûlé, un ancêtre illégitime, ou une
lignée qui s’est perdue dans la brume du XVIIe siècle.
Les
blocages qu’on rencontre tous un jour ne tombent pas d’un clic.
Parfois, ils résistent des années. Et ce n’est pas une IA ou une
base de données qui va magiquement faire apparaître un acte
manquant ou résoudre un mystère familial vieux de 200 ans.
La
technologie aide, oui. Elle donne des outils formidables. Mais le
vrai travail, c’est encore vous qui le faites
: en creusant, en recoupant, en cherchant là où personne n’a
encore pensé à regarder.
L'IA
est un allié exceptionnel pour accélérer et faciliter la recherche
en généalogie, mais elle fonctionne mieux en complément de la
perspicacité humaine.
La
généalogie reste une aventure qui combine technologie, patience et
intuition personnelle.
Alors
non, la technologie ne fait pas de miracle. Mais avec un bon
chercheur derrière l’écran, parfois… elle ouvre une brèche.
11/ Les
outils numériques sont difficiles à utiliser
Je
répondrai tout simplement : pas
plus qu’un registre écrit à la plume en latin du XVIIIe siècle
ou
en écriture gothique !
Soyons
honnêtes : oui, au début, les plateformes généalogiques, les
archives en ligne ou les bases de données peuvent paraître un peu
techniques. Mais on
apprend vite.
Et surtout, c’est
bien plus simple que de se rendre dans une mairie à 300 km pour
consulter un registre jauni, fort
mal écrit ou à moitié effacé.
Les
outils numériques sont faits pour aider, pas pour embrouiller. Il
faut juste prendre un peu de temps pour les apprivoiser. Et bonne
nouvelle : des
milliers de généalogistes amateurs (de tous âges) y arrivent très
bien ! Alors
pourquoi pas vous !
Le
plus difficile, ce n’est pas la technologie. C’est
de savoir quoi chercher, où chercher, et comment interpréter ce
qu’on trouve.
Et ça, ça vient avec la pratique — pas avec l’âge ou le niveau
en informatique….
Alors
pas de panique : les outils numériques, ça se dompte. Et une fois
qu’on a compris comment ça marche, on
ne peut plus s’en passer.
*
J’espère
vous avoir convaincus que la généalogie numérique est une
merveilleuse opportunité d'explorer son histoire familiale, mais
elle nécessite toujours patience, rigueur et esprit critique.
Alors,
vous commencez quand ?